Bonjour. Donald Trump accusé de détruire la Maison Blanche, la charge n’est pas nouvelle mais elle a pris cette semaine une signification littérale avec le début des travaux de démolition de l’aile Est pour construire une grande salle de réception à la place. Publiées lundi, les premières photos impressionnantes des bulldozers rasant cette partie de l’édifice ont provoqué l’indignation de beaucoup d’Américains. « Ce n’est pas sa maison, c’est notre maison », a protesté Hillary Clinton. « Indignation feinte », a répliqué la Maison-Blanche qui fait financer les 250 millions de dollars de travaux par des donateurs (la liste complète ici) issus principalement de la Tech et des cryptomonnaies.
DÉFENSE EUROPÉENNE
WE ARE THE CHAMPIONS. Trois industriels européens, Airbus Defense, Leonardo et Thales, ont décidé d’unir leurs forces dans les satellites, notamment à orbite basse, le gros marché des années à venir dominé aujourd’hui par SpaceX avec sa galaxie Starlink. Si tout se passe bien, le futur champion européen de l’espace comptera 25.000 salariés pour 6,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires. « Une excellente nouvelle » pour la présidente de la Commission européenne dont les services devront toutefois donner leur feu vert à cette concentration.
Liste de courses. Ce futur champion européen laisse sur le côté un petit acteur allemand de l’espace, OHB. Mais l’Allemagne n’est pas en reste. En mai, le chancelier Friedrich Merz avait annoncé sa volonté de faire de la Bundeswehr « l’armée conventionnelle la plus puissante d’Europe ». Et les moyens arrivent. POLITICO a mis la main sur un document de 39 pages dressant la liste des équipements (abonnés) que souhaite acheter l’armée allemande pour 377 milliards d’euros. Le géant de la défense Rheinmetall (le portrait de son PDG ici) mais aussi Diehl Defence, le fabricant de missiles bavarois, se taillent sans surprise la part du lion dans cette avalanche d’appels d’offres à venir.
Tous les pays n’ont pas les moyens de l’Allemagne. Dans une interview à POLITICO, le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis relance l’idée, également défendue de longue date par la France, d’emprunts européens communs pour financer l’effort de défense.
Fixette. Trump continue de s’en prendre à l’Espagne qui ne dépense que 1,3% de son PIB pour la défense et est le seul pays de l’OTAN à avoir refusé d’entériner l’objectif de 5% d’ici 2035. A ce stade, la rhétorique trumpienne n’inquiète pas outre mesure Madrid. Mais la pression monte.
SOUVERAINETÉ
UNE ÂPRE BATAILLE se joue aussi dans le champ informationnel où l’Europe cherche à préserver ce qui lui reste de souveraineté. Un sommet sur le numérique aura lieu à Berlin en novembre, mais notre enquête auprès des acteurs du numérique (abonnés) montre qu’entre la France et l’Allemagne, les stratégies divergent sur la manière de se « désintoxiquer » des Gafa.
Terres très rares. La lutte pour la souveraineté passe aussi par l’accès aux terres rares, ces minéraux incontournables dans la fabrication – entre autres – d’armes de pointe (le Rafale et ses missiles en contiennent…). D’où l’inquiétude des Européens face au durcissement chinois, Pékin fournissant 99% des 17 terres rares utilisées par l’industrie du continent. Alors que les Etats-Unis menacent la Chine de droits de douane à 100% en guise de rétorsion, l’Europe est à la recherche d’une autre stratégie.
L’affaire Nexperia illustre de manière exemplaire les ambiguïtés du combat pour la souveraineté. La semaine dernière, le gouvernement des Pays-Bas décidait, fait rarissime dans ce pays libéral, de prendre le contrôle de ce fabricant de puces néerlandais contrôlé par des capitaux chinois. Motif : le risque que des technologies sensibles développées en Europe soient transférées en Chine. Une décision qui a brusquement refroidi les relations avec Pékin.
Aftershock. Mais la décision néerlandaise a mis le feu à l’industrie automobile, principale cliente des puces de Nexperia. Les constructeurs européens redoutent que la société ne soit bientôt plus en mesure de livrer ses pépites électroniques. Car sitôt connue la mesure néerlandaise, Pékin a interdit la livraison à Nexperia de composants nécessaires à la fabrication des fameuses puces. Des chaînes de montage automobiles pourraient ainsi se retrouver bientôt à l’arrêt faute de ces semiconducteurs, comme au temps du Covid.
Même l’énergie solaire pourrait ne plus être totalement souveraine. Les fournisseurs chinois, Huawei en tête, contrôlent en effet 65% de la puissance installée en Europe. La crainte des experts européens se concentre sur les onduleurs solaires, ces composants qui transforment l’énergie du soleil en électricité. Ces onduleurs « made in China » étant connectés à Internet, leur fabricant pourrait très bien couper le courant à distance et plonger ainsi l’Europe dans le noir. Nous avons enquêté sur cette menace qui montre, comme dans les télécoms, la vulnérabilité de nos infrastructures critiques.
PRESSION SUR LA RUSSIE
CHAUD-FROID. Frustré de ne pas obtenir de progrès dans le dossier ukrainien, Donald Trump a décidé de blacklister Rosneft et Lukoil, les deux plus grandes compagnies pétrolières russes. Une première selon le secrétaire au Trésor Steve Bessent qui s’est dit prêt à prendre des mesures supplémentaires si cela ne suffit pas à mettre un terme « à la guerre insensée du président Poutine ».
L’Europe et l’Ukraine se sont félicitées de cette décision alors que Bruxelles s’apprête à prendre un 19e paquet de sanctions contre Moscou. En frappant « l’empire » Rosneft (40% du pétrole russe, 39 navires), Washington touche directement le Trésor russe puisque le pétrolier a rapporté 6100 milliards de roubles (65 milliards d‘euros) aux caisses de l’Etat.
La décision américaine pourrait stopper pour de bon les ventes de pétrole russe à l’Europe et forcer les deux géants pétroliers à vendre leurs actifs à l’étranger. Un ancien dirigeant de Lukoil nous a ainsi expliqué combien l’impact risque d’être « catastrophique » pour la compagnie et la contraindre à céder ses parts dans des projets en Egypte ou en Irak.
Touché. A en juger par la réaction courroucée de Moscou et enflammée – il en a l’habitude – de Dmitri Medvedev, le Kremlin ne digère pas cette décision de la Maison-Blanche qui porte un coup supplémentaire à l’économie déjà très affaiblie du pays. Dans la foulée, la banque centrale russe a d’ailleurs baissé ses taux d’intérêt et révisé en baisse sa prévision de croissance à une fourchette de 0,5 à1% cette année (contre 1 à 2% dans sa précédente estimation).
Tomahawk. Les sanctions sont une chose mais la Finlande veut aller encore un cran plus loin. Dans une interview à POLITICO, le Premier ministre Petteri Orpo juge que Poutine représente « une menace permanente pour l’Europe » et demande à l’administration américaine d’autoriser l’Ukraine à utiliser des missiles à longue portée Tomahawk contre la Russie. La Finlande est un allié écouté des Etats-Unis, son président Alexander Stubb entretient une relation privilégiée avec Donald Trump, notamment comme partenaire de…. golf.
Pour le Chef d’état-major des Armées français, le général Fabien Mandon, les perspectives sont claires : Moscou réorganise ses forces en vue d’une confrontation avec l’OTAN. En réponse, les forces françaises doivent être prêtes à « un choc avec la Russie » dans les 3 à 4 ans, a prévenu le CEMA devant l’Assemblée nationale.
AVANT DE SE QUITTER
— Faites connaissance avec Monique Barbut, nouvelle ministre de la Transition écologique, peu connue du grand public mais experte des négociations internationales sur le climat et proche d’Emmanuel Macron.
— Elle est médecin, sa fille de 19 ans a été tuée dans la catastrophe ferroviaire de 2023 (57 morts) qui déclencha dans toute la Grèce un vaste mouvement de ras-le-bol à l’égard d’un Etat jugé inefficace et d’une classe politique corrompue. Aujourd’hui, Maria Karystianou, 52 ans, fait figure de recours inattendu pour diriger un pays qui n’accorde plus guère de confiance aux politiciens traditionnels. POLITICO l’a rencontrée.
— A lire cette enquête passionnante aux Pays-Bas où se dérouleront des élections législatives le 29 octobre sur fond de crise aiguë du logement. Les prix ont quadruplé en 30 ans, plus du quart du pays se trouve sous le niveau de la mer, l’armée manque d’espaces d’entraînement, l’agriculture est sous pression et les candidats rivalisent d’idées radicales pour libérer de la place pour construire : l’extrême droite veut carrément raser le siège de la radiotélévision publique tandis que les Verts proposent de supprimer deux aéroports.
Un grand merci à: Pauline de Saint Remy pour la relecture et à Jeanette Minns pour la mise en ligne.
ABONNEZ-VOUS aux newsletters de POLITICO (en anglais): Brussels Playbook | London Playbook | London Playbook PM | Playbook Paris | EU Election Playbook | Berlin Playbook | Global Playbook | POLITICO Confidential | Sunday Crunch | EU Influence | London Influence | Berlin Bulletin | Living Cities | D.C. Playbook | D.C. Influence | Canada Playbook | POLITICO Pro newsletters